Le billet MPM de janvier 2019

Bien démarrer l'année en sachant que, à la MPM, "1 + 1 = 3"

Non, ce n'est ni un gag, ni une provocation gratuite, ni une erreur de frappe. C'est simplement la formulation elliptique d'une réalité sociologique et cognitive : on réfléchit et on agit mieux à deux ou à plusieurs que seul dans son coin. Edgar Morin le dit autrement : dans un système complexe, le tout est supérieur à la somme des parties. Mais encore faut-il que le binôme ou le groupe fasse "système", c'est-à-dire que les personnes en présence partagent les mêmes finalités et qu'elles se donnent les moyens d'une authentique et active coopération.
C'est ce qu'ont bien montré les intervenants des rencontres du 1^er trimestre.
C'est ce que la MPM propose de partager dès maintenant avec celles et ceux qui le souhaitent.

Retour sur une trilogie du changement pédagogique

Les exemples de changement dans l'École publique présentés dans les trois rencontres du 1^er trimestre sont de belles illustrations de la formule-titre de ce billet. Examinons-les brièvement en les prenant à rebrousse-poil chronologique.

L'équipe du lycée Koeberlé de Sélestat (rencontre du 4 décembre) en est à sa 7^e année d'existence. Les intervenants ont tenu à montrer comment un groupe s'est constitué, avec le soutien du chef d'établissement, et a pris tout son temps pour mettre en œuvre des pratiques d'accompagnement des élèves, d'abord dans le cadre restreint du dispositif d'accompagnement personnalisé de l'élève, puis dans celui d'une classe que l'on peut qualifier d'expérimentale. Tout au long de son cheminement, l'équipe, toujours composée de volontaires, a été – et est encore – accompagnée par une équipe d'enseignants-chercheurs de l'université de Strasbourg.

A Mons-en-Barœul, (rencontre du 13 novembre), c'est toute une équipe d'enseignants Freinet qui a réussi le pari de remettre debout, en cinq ans, un groupe scolaire à la dérive. Les intervenants ont insisté à plusieurs reprises sur le rôle précieux de l'inspecteur de la circonscription dans la nomination d'une équipe totalement cohérente sur le plan des idées et des pratiques à mettre en œuvre. Les enseignants ont ainsi pu réaliser le rêve de nombreux militants pédagogiques : développer toutes les potentialités de leur système éducatif à l'échelle de l'établissement. Et cette fois, l'équipe des enseignants-chercheurs de l'université de Lille a eu pour fonction d'évaluer scientifiquement les retombées de l'expérience pédagogique sur la vie de l'école et sur les résultats des élèves. Et de conforter ainsi l'équipe dans ses options et son fonctionnement.

Il en va un peu différemment avec le collège "révolutionnaire" présenté par Jérôme Saltet (rencontre du 2 octobre) puisqu'il ne s'agir encore que d'un projet, longuement mûri avec André Giordan. Projet total, englobant réflexion pédagogique, engagement des acteurs, conception architecturale, intégration dans l'environnement… Projet qui, pour espérer pouvoir devenir réalité, a eu besoin de réaliser ce que J. Saltet a appelé l'alignement des 3 planètes : ministérielle, académique et départementale. Projet ambitieux qui n'a commencé à prendre forme que lorsque ses concepteurs ont défini les finalités et les valeurs éducatives à inscrire au fronton du futur établissement.

Autant d'occasions de prendre la mesure de la capacité du travail en équipe à faire de la pédagogie un puissant levier du changement dans l'École à l'échelle locale.

Et après ces rencontres, on fait quoi à la MPM ?

Le temps réservé aux échanges entre les intervenants et le public est souvent bien trop court pour permettre à chacun de s'exprimer, de réagir, de poser des questions. Dans le climat d'écoute et de partage créé par la proximité des chaises disposées en demi-cercle, les prises de parole se succèdent spontanément. Untel souhaite avoir une information complémentaire d'ordre technique. Tel autre fait part de ses propres tâtonnements. Tel autre encore aimerait mieux

comprendre comment "ça" a commencé. "Et nous aussi, à Mulhouse, on pourrait ...?" On a parfois l'impression, en fin de soirée, qu'il s'en faudrait de peu pour qu'un petit groupe se constitue et se dise : "Allez, on y va !"

On entend aussi des interrogations comme : "On a le droit de… ? Oui, bien sûr qu'on a le droit de sortir des sentiers et des ornières pédagogiques qui ne mènent nulle part. Dans un récent colloque, Philippe Meirieu a défendu la thèse selon laquelle l'enseignant est un concepteur et non un simple exécutant des directives venues d'en haut. En conclusion de son intervention, il a dénoncé le risque de "paupérisation" du métier. Nous ne disons rien d'autre à la MPM quand nous affichons que la pédagogie et l'association ont en commun de contribuer au développement de l'autonomie, de la responsabilité et à l'émancipation des jeunes... aussi bien que des enseignants et des éducateurs.
D'ailleurs, d'aucuns n'ont pas attendu l'ouverture de la MPM, en février 2016, pour se lancer, seuls ou en équipe, dans des pratiques qui, à défaut d'être innovantes, font bouger les lignes et découvrir de nouveaux horizons éducatifs.

Mais il est vrai qu'il est plus facile de se mettre en mouvement à plusieurs plutôt que seul, isolé dans son établissement. Et que, comme le dit une autre formule, s'il est vrai qu'on va moins vite à plusieurs, il est aussi vrai qu'à plusieurs on va plus loin. Et que souvent 1 + 1 font plus que 3.

C'est pour cela que la MPM met en place, le 22 janvier, une rencontre à laquelle sont invités toutes celles et tous ceux pour qui changement (pédagogique) rime avec maintenant : des personnes déjà engagées (fraîchement ou de longue date) dans des pratiques qui sortent de l'ordinaire, aussi bien que des personnes qui s'interrogent sur ce qu'elles font et/ou qui sont en quête de conseils, de pistes ou d'interlocuteurs pour faire évoluer leurs pratiques et leurs conceptions en matière d'enseignement, d'éducation et d'apprentissage. Une rencontre sans intervenant extérieur. Une rencontre tout entière consacrée à des échanges entre pairs, entre pairs et ex-pairs.

La veille, le lundi 21 janvier, la MPM propose de repartir À la rencontre des grands pédagogues. Au programme de cette première séance de la saison 2 : Carl Rogers, avec cette interrogation : "Suffit-il d'écouter pour aider ?". Le principe reste le même et se résume dans cette formule : l'héritage d'un grand pédagogue + des questions de praticiens d'aujourd'hui = des pratiques pédagogiques pour demain.

Avec les meilleurs vœux de la MPM et la perspective de belles aventures pédagogiques collectives pour 2019 !