Billet MPM d'avril 2025

Humaine ou artificielle,
l’intelligence est à l’affiche des Rencontres de la MPM

Alors que les débats sur l’intelligence artificielle (IA) font rage, notamment quant à la place de l’IA générative à l’école, la MPM propose d’ouvrir la réflexion sur le rôle de l’intelligence humaine dans les processus d’apprentissage et d’éducation aux différents âges de la vie. La MPM le fait modestement et sereinement à l’occasion de deux Rencontres que les hasards de la programmation ont placé à la toute fin du mois d’avril et au tout début du mois de mai, de part et d’autre d’une Fête du Travail que nous qualifierons d’« intellectuel ». 

Le 28 avril, Sarah Lamy nous emmène « Dans le sillage de Peter Senge » pour « explorer l’apprenance collective en formation d’adultes »

C’est l’occasion de fêter le premier anniversaire de la nouvelle version de notre Atelier  « Dans le sillage des grand(e)s pédagogues ». Un Atelier co-animé par la MPM et le Rezo, dont la vocation est de faire découvrir des outils, des pratiques, des démarches, des dispositifs pédagogiques qui peuvent se présenter comme des « possibles » éducatifs susceptibles de répondre aux besoins des publics et aux enjeux de notre temps. Cet Atelier donne la priorité aux acteurs locaux.

Cependant, pour cette 7e Rencontre, nous nous écartons sensiblement de la route empruntée depuis la création de l’Atelier. D’abord parce qu’il s’agit là de pratiques pédagogiques en direction de publics d’adultes. Ensuite parce que Peter Senge n’est pas un « pédagogue » au sens plein du terme, au même titre que Célestin Freinet ou Maria Montessori, dont nous avons suivi le sillage lors de précédentes Rencontres.

Professeur de management, directeur du Center for Organizational Learning du MIT Sloan School of Management, Peter Senge est l’auteur de l’ouvrage de référence La cinquième discipline (1990), qui met en exergue l'importance de l'apprentissage collectif et de la pensée systémique pour favoriser la transformation des organisations en contexte de transition. Aujourd’hui, des formateurs de toutes les disciplines et de nombreux spécialistes en sciences de l’éducation se réclament de ses principes qui mettent en avant la capacité des humains à mettre en commun leur intelligence pour apprendre à répondre aux défis de notre temps.

En tant que formatrice d’adultes et chef de projet pédagogique, Sarah Lamy se propose d’expliquer comment elle a expérimenté deux outils clés de Senge, la pratique réflexive et l’apprenance collective, d’abord en impulsant des partages de pratiques entre enseignants à l’Université de Haute-Alsace, puis en pratiquant la co-création et la co-évaluation des compétences avec ses stagiaires de la formation professionnelle.

📆 Rendez-vous le 28 avril, de 18 h 30 à 20 h 30, à la Maison des associations de Bourtzwiller, 62 rue de Soultz, à Mulhouse ou en visio. 

 

Le 6 mai, Teddy Mayeko nous invite à réfléchir « quand les IA rencontrent les élèves »

RD n47 VF1« Avec l’essor des systèmes génératifs comme ChatGPT, Gemini ou, plus récemment, Deepseek, le secteur de l’IA est en train de redessiner les contours d’un nouveau modèle de société, interrogeant nécessairement l’avenir de l’Homme dans un monde où les canaux d’information et les moyens de production sont en passe d’être intégralement bouleversés. En un mot, nous sommes à l’aube d’une révolution dont l’engouement qu’elle suscite chez les uns n’a d’égal que la peur qu’elle engendre chez les autres. On peut le dire : l’IA est un sujet clivant. »

C’est Teddy Mayeko lui-même qui pose ainsi le cadre de son intervention. Teddy Mayeko, Maître de conférences à l’Université Cergy Paris n’est pas un spécialiste de l’utilisation de l’IA en classe. Il vient nous apporter un éclairage à large spectre sur l’articulation entre intelligence artificielle et intelligence humaine. Et il continue ainsi :

« Il semble qu’un certain nombre de nos craintes sont fondées, notamment lorsque nous envisageons les possibles répercussions de l’IA dans le secteur de l’éducation. Alors que le rapport des jeunes à l’effort est régulièrement décrié, que notre goût pour la lecture s’atrophie un peu plus chaque année, et que le virtuel s’impose dans des espaces désertés depuis longtemps par le corps, les IA génératives ouvrent une boîte de Pandore menaçant d’extinction l’un de nos acquis les plus précieux : la possibilité de penser par soi-même. »

Dans l’Expresso du Café pédagogique du 14 novembre dernier, Teddy Mayeko avait retenu notre attention avec ces propos :
« ChatGPT introduit une sorte de rupture paradigmatique, puisqu’il est désormais possible de confier à une machine le soin de penser à notre place. Ainsi, de plus en plus fréquemment, les élèves sacrifient l’étude des grandes œuvres ou la pratique des langues à la puissance calculatoire des IA. Les devoirs donnés à la maison, anciens fiefs de l’apprentissage et du travail, sont devenus les symboles de l’accessoire et du dérisoire. Là où il nous fallait plusieurs heures pour lire un texte, en extraire les idées principales, produire une synthèse argumentée… quelques clics suffisent désormais. »  

Dans l’Expresso du 14 mars, Teddy Mayeko revient sur le lien entre recours à l’IA et perte du sens de l’effort à l’occasion de la récente parution de son ouvrage « Le goût de l’effort » (L’Harmattan, 2025) :
« Aujourd’hui, l’essor des intelligences artificielles redessine entièrement le paysage de nos vies. En nous dispensant d’agir et de penser, elles modèlent une réalité alternative au sein de laquelle l’effort semble à la fois vain et obsolète. Or, ce nouveau monde masque peut-être une réalité encore plus insidieuse : plus nous rejetons l’effort, plus nous devenons dépendants des avatars qui pensent et agissent à notre place. C’est pourquoi je tiens à rappeler dans ce livre que l’effort est avant tout un levier d’émancipation. En permettant à chaque personne d’acquérir de nouvelles habiletés, d’apprendre à mobiliser plus opportunément ses ressources et d’assumer ses propres choix, il est un cheminement possible vers le progrès et l’autonomie. »

Laissons maintenant Stéphane Bonnet et Dominique Bucheton, deux didacticiens du français, questionner, dans l’Expresso du 10 mars, la place de l’IA dans l’éducation à l’écriture :

« L’Intelligence Artificielle générative fournit désormais aux élèves des textes fidèlement rédigés, normés, stéréotypés. L’Ecole peut-elle se résigner à ce modelage, de la pensée et de l’expression, et aux sempiternels discours de déploration ? Ne doit-elle pas au contraire renouveler ses ambitions et ses pratiques pour faire de l’écriture au temps de l’IA un chemin d’émancipation, de créativité, de réflexion, de socialisation, d’imaginaire ? »

📆 Rendez-vous le 6 mai, de 18 h 30 à 20 h 30 à la Maison des Associations de Bourtzwiller pour notre Rencontre-débat n° 47.

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Les jardiniers de l’esprit humain que sont les pédagogues ne le diront jamais assez :
les pensées sauvages sont toujours plus belles

que les pensées artificielles.