Billet MPM - Juin 2022

La Maison de la Pédagogie de Mulhouse

pour contribuer au débat citoyen sur le devenir

de l’éducation et de l’école


 

 

Qu'est-ce que
la pédagogie ?
 
"Vous faites quoi
à la MPM ?"
 

La MPM a fêté son 5e anniversaire et les 100 ans de l’Éducation nouvelle

Trace de la journée du 09 octobre 2021PDF.png

Présidentielle aussi bien que législative, les campagnes électorales de ce printemps 2022 n’ont pas brillé par la place faite aux questions d’éducation. En dehors des batailles de chiffres sur le montant des rémunérations des enseignants et du nombre de recrutements à inscrire au prochain budget de l’Education nationale, qui a entendu parler du devenir de l’école de l’après covid dans un monde où l’on ne parle partout, selon le lieu d’émission, que de transition, de mutation, de basculement ?

Comme si la jeunesse n’était pas l’avenir de nos sociétés et de notre commune humanité…

 « L’éducation au fond du trou »

C’était le gros titre de l’Expresso du Café pédagogique du 24 mai dernier. François Jarraud, responsable de ce quotidien en ligne, y présentait les résultats du « Baromètre UNSA-Education ».

F. Jarraud souligne d’abord la fiabilité de cette enquête en direction de l’ensemble du monde enseignant : « de mars à avril 2022, pour sa 10e édition, 43 000 personnels d'éducation ont répondu aux questions. Un nombre très important qui donne à cette enquête une vraie représentativité. D'autant que les adhérents ou sympathisants Unsa ne représentent que 33 % des participants. La moitié se déclarent proches d'aucun syndicat. ».

« Globalement, 92 % des répondants aiment leur métier, 29 % ne trouvent plus de sens à leurs missions. C'est le cas de 33 % des enseignants, 32 % des IPR (inspecteurs du 2nd degré) et 42 % des IEN (inspecteurs du 1er degré). 33 % des enseignants envisagent de quitter l'éducation pour travailler dans le secteur privé (hors enseignement). Ils étaient deux fois moins nombreux en 2016. C'est aussi le cas de 24 % des personnels de direction, 20 % des IEN et 12 % des IPR. Voilà qui laisse augurer d'une autre crise du recrutement, d'autant qu'un pourcentage plus important encore souhaite quitter son métier pour un autre dans le secteur public. Un personnel sur quatre seulement se sent reconnu dans son travail, soit deux fois moins aussi qu'en 2016 (27 et 46 %). Seulement 19 % des enseignants sont dans ce cas. » Et selon la même enquête, seulement 16% des enseignants encourageraient leurs enfants à choisir l’enseignement.

En fin d’article, F. Jarraud évoque quelques pistes dans des termes qui ne sont pas sans rappeler les mises en garde des citoyens face aux risques liés au dérèglement climatique et à la destruction de la biodiversité : « Sur le long terme pour de nombreux sujets tels que l’inclusion, la transition écologique ou encore le climat scolaire, il faut prendre le temps de parler. On a besoin de débats qui permettent d'associer les personnels, à condition que les conclusions ne soient pas écrites à l'avance. Au niveau de délabrement moral où les 5 années de JM Blanquer laisse l'Ecole, sans réel changement, le gouvernement prend le risque de voir l'Ecole s'effondrer. »

 Une éducation à la hauteur des enjeux de notre temps

C’est l’ambition de Convergence(s) pour l’Education nouvelle, à l’initiative de 8 mouvements pédagogiques et d’éducation populaire, à l’échelle nationale et internationale. La réflexion collective a donné lieu à l’élaboration d’un projet de Manifeste qui a permis à la MPM de poursuivre les échanges engagés lors de sa manifestation Anniversaires 2021 du 9 octobre dernier, autour de sa proposition de « nouvelle Education nouvelle »

Rappelons d’abord que toute éducation est politique et renvoie à un projet de société qu’elle contribue à conforter ou à modifier de façon plus ou moins radicale. Or, aujourd’hui, nos sociétés sont confrontées à des défis d’une grande ampleur dans de nombreux domaines :

  • écologique, avec le dérèglement climatique et la destruction de la biodiversité ;
  • politique, avec les insuffisances et les fragilités de la vie démocratique ;
  • social et sociétal, avec le maintien (voire l’aggravation) des inégalités sociales et des discriminations de toutes natures ;
  • technologique, notamment avec la révolution numérique ;
  • culturel, avec la montée des intégrismes, de l’obscurantisme, du rejet de l’autre…

L’éducation d’aujourd’hui et de demain se doit donc d’être porteuse d’un monde vivable et habitable, d’un monde de paix et de compréhension entre les peuples et les cultures, d’une société plus juste, plus démocratique, plus solidaire, plus humaine, respectueuse des droits de l’enfant et attachée aux valeurs d’émancipation individuelle et collective, de solidarité et d’entraide.

Depuis un siècle, l’Éducation nouvelle n’a cessé de mettre en avant le principe d’éducabilité, la nécessité de prendre en compte les besoins, les intérêts, les envies, les rythmes, la singularité des enfants, des élèves. Pour cela, les différents mouvements pédagogiques qui s’en sont réclamés ont mis en place des pédagogies actives et ont privilégié la coopération.

Riche de ce patrimoine de référence, et enrichie des apports des recherches en sciences de l’éducation, la pédagogie peut être conçue comme articulation entre théorie et pratique, comme quête permanente de cohérence entre les valeurs, les dispositifs d’apprentissage et les savoirs en jeu. Elle est donc invitation permanente à la prise d’initiative et à la créativité individuelles et collectives qui font de chaque éducateur un concepteur, un auteur de sa pratique, et non un exécutant. Relever les défis de notre temps passe aussi par l’appropriation de savoirs pour habiter le monde, en comprendre la complexité et agir sur lui en connaissance de cause, tout en interrogeant la pertinence, la construction de ces savoirs, ainsi que leur sens pour les jeunes. C’est aussi, plus que jamais, considérer l’éducation comme un processus global, ce qui suppose d’être attentif aux conditions d’existence et de vie des enfants, des jeunes, à la prise en compte des différentes composantes de la personne, à la place croissante des apprentissages informels dans les différents lieux de vie des enfants et des adolescents

Dans ce monde aux prises avec une incertitude croissante, l’école n’en doit pas moins continuer à jouer un rôle spécifique et incontournable dans l’éducation des nouvelles générations en mettant notamment l’accent sur les points suivants ;

  • faire de l’école le lieu privilégié du vivre, du faire et de l’apprendre ensemble ouvert à tous, dans le respect de la mixité sociale et de la laïcité ;
  • repenser la « forme scolaire » de façon à permettre une diversification des temps et  des espaces scolaires, des modes de regroupement des élèves et à instaurer d’autres modes de validation des parcours de formation ;
  • associer les élèves à l’organisation de leurs apprentissages, à l’élaboration de leur cursus de formation ;
  • intégrer les enjeux d’apprentissage de notre temps : maîtrise de l’outil numérique, rapport à la nature…
  • lier la transmission/appropriation des savoirs au développement de l’esprit critique, à la créativité et à l’imaginaire pour ouvrir sur le monde de demain ;
  • pour les enseignants, construire de nouvelles compétences professionnelles, notamment la posture d’accompagnement, pour permettre à l’élève de devenir l’auteur (et non plus seulement l’acteur) de ses apprentissages… et de sa vie ;
  • réaffirmer l’attachement à un service public soucieux de la réduction des inégalités scolaires et du maintien de l’école en dehors de la sphère marchande.

A plus long terme, l’éducation doit ainsi devenir l’affaire de tous tout au long de la vie, avec la contribution de tous les acteurs d’un territoire, reconnus comme détenteurs de connaissances et de compétences à transmettre et à partager dans ce qui deviendrait alors un « écosystème apprenant ».

 Et la MPM dans tout ça ?

Quand on nous demande ce qu’est cet ovni associatif dénommé Maison de la Pédagogie de Mulhouse, nous avons l’habitude de répondre en disant que ce n’est ni une courroie de transmission de l’institution chargée de relayer les injonctions ministérielles, ni un organisme chargé de la formation des futurs responsables de l’éducation, ni un nouveau mouvement pédagogique détenteur de solutions inédites, ni encore un syndicat prétendant représenter les personnels travaillant dans les différents domaines de l’éducation.

Au-delà de cette présentation par la négative, la MPM se propose aujourd’hui de contribuer le plus largement possible au débat sur le devenir de l’éducation et de l’école, de différentes façons :

  • en participant à des échanges dans le cadre de collectifs tels que Convergence(s) pour l’Education nouvelle et le Collectif d’interpellation du curriculum (CICUR) ;
  • en sollicitant les apports d’intervenants sur des questions vives telles que la capacité de l’école à former des citoyens (en mars dernier), à « ré-enchanter les savoirs » dans une institution plus juste et plus émancipatrice (en février) ;
  • en animant des ateliers de réflexion autour d’une thématique spécifique ;
  • en s’impliquant, avec d’autres structures, dans des expérimentations, telles que la création d’un « quart-lieu apprenant » à Bourtzwiller, de façon à explorer sur le terrain le champ des possibles pédagogiques et éducatifs ;
  • en donnant la parole à toutes celles et ceux qui veulent la prendre pour partager leurs réflexions, leurs témoignages, leurs propositions sur le devenir de l’école et de l’éducation.

A n’en pas douter, sortir « l’éducation du trou », c’est répondre à de légitimes exigences d’ordre financier et matériel mais aussi obtenir une meilleure reconnaissance des personnels de la part de l’institution. Mais, pour la MPM, c’est aussi construire un imaginaire éducatif en cohérence avec les défis qui s’imposent à nous et aux futures générations.

Revaloriser le métier d’enseignant – et, plus largement, d’éducateur – c’est aussi donner tout son sens, toute sa valeur, toute sa dimension anthropologique à l’éducation comme bien commun, porteur d’un monde meilleur et désirable.

Après l’absence de « pédagogie contemporaine » constatée par Bernard Charlot dans Education ou barbarie, Il est temps d’en appeler, avec Sylvain Wagnon, dans le n° 184 d’avril 2022 de la revue Dialogue, intitulé « 100 ans d’Education nouvelle ; Cultiver l’à venir », à un « New Deal pédagogique ».

À lire ...

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