A la rencontre des grand(e)s pédagogues :
Léon TOLSTOI (1822-1910)

 

 

Rencontre PDF

Lundi 25 septembre 2023 de 18 h 30 à 20 h 30, à la Maison des associations de Bourtzwiller, 62 route de Soultz, à Mulhouse
(parking et arrêt tram du Rattachement).

De prime abord, il y a de quoi être surpris(e) de trouver l’auteur de « Anna Karénine » et de « Guerre et paix » à l’affiche d’une « Rencontre avec les grands pédagogues ».


Et pourtant… 

Dans le court métrage qu’il a consacré à Léon Tolstoï, qui servira d’introduction à la soirée, Philippe Meirieu le présente comme l’une des grandes figures de l’éducation conçue comme chemin vers l’émancipation avec des questions telles que :
• que faut-il enseigner ?
• avec quelles pratiques pédagogiques ?
Des interrogations qui résonnent fort avec les préoccupations de la Maison de la Pédagogie de Mulhouse.
Les réponses apportées par Tolstoï restent d’une grande actualité et ne devraient pas manquer de susciter le débat entre les participants à cette rencontre…

 

 

Animation

Rencontre animée par Agathe Chenelot et Tina Steltzlen.

 

Trace de la rencontre PDF

 

À la rencontre des grands pédagogues

Léon TOLSTOI (1822-1910) - Lundi 25 septembre 2023

Léon TolstoÏ : un grand pédagogue méconnu

Le film de Philipe Meirieu réalisé pour la série « L’éducation en questions » au début des années 2000 nous a permis de faire connaissance avec celui qui est surtout connu comme grand romancierTolstoï va rêver de libérer les serfs qui travaillent sur les terres de son domaine. Il a voulu donner ses terres mais les personnes qui travaillaient dessus ont refusé et il s’est alors demandé pourquoi refusent-ils la liberté. Il créera une école puis ira voir des écoles dans plusieurs pays européens. Selon lui, l’école est la servitude, l’abrutissement. La vie n’est pas dans l’école. Dans son école, pas de punition, il a l’envie de montrer les bienfaits de la vie et non les méfaits. Selon lui, l’école est dans les musées, les laboratoires des scientifiques. Mettre les enfants en contact avec la culture, loin d’une programmation est ce qu’il veut faire. Il veut s’appuyer sur les questions des enfants et non sur ce que l’on sait déjà. La question venue des enfants doit lancer une dynamique (une question puis une autre, avec ou sans réponse) et ouvrir vers le monde. Les GRANDES QUESTIONS ont alors leur place : la vie et la mort ou le bonheur. Il faut créer les aller-retours entre l’école et LA VIE (techniciens, artistes, musées…) car à l’école ce sont uniquement des adultes issus d’un espace clos (l’école) qui interviennent.  Les enseignants ne l’ont souvent jamais quittée…

Tolstoï a inventé la prolifération des lieux culturels car selon lui, si l’enfant fréquentait des lieux variés l’école jouerait un autre rôle :  pas uniquement la transmission des savoirs mais plutôt une réflexion sur ceux-ci.

TolstoÏ et nous

Les échanges entre les participants ont permis de revenir sur la sidérante actualité pédagogique de Tolstoï autour de plusieurs thématiques et interrogations.

L’école hors l’école

Dans la lignée des préconisations formulées par Tolstoï, Le petit film de Philippe Meirieu a montré un groupe d’élèves en train d’échanger avec le paléontologue Pascal Picq lors d’une visite au Muséum d’histoire naturelle de Paris. Une réponse à la question posée par P. Meirieu en titre de son film : « Faut-il croire le professeur sur parole ? »… Où aller chercher à l’extérieur de l’école, au plus près des détenteurs du savoir ?

Mais la VRAIE vie est aussi à l’école. Pour Tolstoï, l’école est partout. Il y a beaucoup de façons d’apprendre. Il importe de s’interroger ou de s’ouvrir vers l’extérieur… de faire sortir les enfants hors de l’école, être sur le terrain. De même que Tolstoï a dit avoir beaucoup appris des paysans, Albert Camus a dit avoir beaucoup appris de ses contacts avec le terrain. La plupart des participants se montre favorable à cette imbrication entre l’école et le monde extérieur, entre l’école et la vie ; mais est-ce aussi simple qu’il y paraît ?

La place de la complexité dans les apprentissages

Tolstoï accorde la plus grande importance à la parole reçue des enfants : une question engendre une réponse qui donne une nouvelle question. Il faut alors pouvoir aborder des questions complexes plutôt que de choisir d’aller du plus simple au plus complexe ; ce qui engendre le mini-débat suivant :

  • on ne peut pas commencer par les choses compliquées ;
  • il faut plutôt inviter à partir de questions complexes ;
  • on peut se poser des questions complexes mais il faut avoir les outils pour cela.

La question des « fondamentaux » dans le processus d’apprentissage

Il y a un temps pour se « poser », pour réfléchir. L’école est importante pour acquérir les fondamentaux et ainsi permettre de pouvoir apprendre, réfléchir. 

On ne peut être libre dans sa façon d’être ou de penser que dès lors qu’on a des connaissances de bases. Le drame est qu’actuellement on considère que formuler sa pensée est inné. Souvent on oublie que les choses ne sont pas innées et qu’on établit parfois des liens tardivement par rapport à certains savoirs.

C’est compliqué de prendre en considération l’ensemble des besoins des élèves tout en enseignant car il faut bien, à un moment, être élève.

Avec les jeunes sortants du collège, on est surpris par le fait ce qu’ils sont sans difficultés apparentes. Mais ils ne maîtrisent pas les fondamentaux et de ce fait, la transmission est compliquée pour les savoirs professionnels. Ils ne nous comprennent pas si bien à l’oral ou par écrit.

L’articulation entre savoirs pratiques et savoirs théoriques est récurrente dans le groupe :

- pour l’un la pratique doit être mise en avant par rapport la théorie car elle devient « le juge de paix » ; - un autre souligne les limites de la pratique : sans théorie, on pénalise les possibles des personnes. 

Peut-être faut-il régulièrement se demander « Qu’est-ce qu’il faut envisager maintenant d’enseigner ? » et que ce ne soit pas uniquement aux enseignants de se poser ces questions.

En fin de séance, retour à Tolstoï

Il est important de re-situer le questionnement qu’il a eu par rapport à la société qui l’entourait. La posture de Tolstoï n’était pas avant-gardiste ou peut-être en Russie à cette époque. Mais l’école offrait une ouverture à des questionnements et un décloisonnement social pour hisser les personnes vers d’autres perspectives.

Une question : Et si l’émancipation des individus avait été, en arrière-plan, le fil rouge des travaux de Tolstoï ?

Un regret : les participants font le constat de l’insuffisance de connaissances précises sur Tolstoï en tant que pédagogue acteur engagé dans son époque.

Un sourire : à une intervention qui souligne que l’École n’est pas la vraie vie, une participante partage une anecdote. Un enfant lui a demandé si sa vie est triste car elle a toujours été à l’école. Il a été rassuré car elle lui a indiqué qu’elle a été ailleurs avant d’être enseignante. 

Trace rédigée à partir des notes prises par Morgane Grelet

Octobre 2023