« À l’ère du numérique, faut-il encore apprendre ? »

DNA Michèle Marchetti 11/10/2017

La Maison de la Pédagogie de Mulhouse organise sa première conférence de l’année au centre sportif régional, le lundi 16 octobre à 19 h, sur le thème « A l’ère du numérique, faut-il encore apprendre ? », avec André Giordan.

« À l’ère du numérique, les jeunes pensent qu’ils n’ont plus besoin d’apprendre de l’école », rappelle André Giordan, ancien enseignant et professeur de Didactique des Sciences : car tout est à la portée d’un clic. « Et pourtant, l’information, il faut aller la chercher » : avoir les bons mots-clés, trier les infos, savoir lire les hypertextes, décoder les données, les vérifier, voir de qui viennent les infos, développer son esprit critique ! « Tout n’est pas intuitif ; et tout n’est pas vrai sur Internet ! », dit-il.

Changer de métiers !

Pour lui, « le métier d’élève a changé. Avant, il était simple consommateur de la parole du professeur ». Et aujourd’hui, le métier de professeur doit aussi évoluer. « Il doit apprendre aux élèves à apprendre. Mais apprendre n’est pas que recevoir des informations ; il faut construire le savoir. Et pour cela, il faut d’abord déconstruire toutes les idées reçues qu’on a ».

Selon André Giordan, il faut continuer à enseigner les fondamentaux : lire, écrire, compter… « mais pas forcément comme actuellement ! On n’est pas obligé d’apprendre à lire à un enfant avec un livre qui ne l’intéresse pas. On peut lui apprendre avec internet, ou un prompteur ; il voit alors très bien à quoi cela pourra leur servir ! L’évolution vers le numérique peut être positive si on sait l’utiliser et si on ne fait pas seulement des jeux stupides sur un ordinateur, car cela offre beaucoup de perspectives et une ouverture sur le monde entier », estime-t-il.

Mais pour l’ancien enseignant, il ne faut pas avoir une vision dichotomique de la chose : « Le ministre ne veut pas de smartphone en classe ; alors qu’on pourrait en avoir un usage intéressant. Et ça n’empêcherait pas de continuer à faire des expériences, d’observer les fleurs… », dit-il, en reconnaissant qu’il faut quand même limiter la consommation d’écran.

Développer “l’apprendre à apprendre”

Mais tout cela s’apprend. Et « il faudrait développer “l’apprendre à apprendre” » : travailler sur la curiosité naturelle des enfants, la mémorisation qui ne se fait pas de la même manière selon les personnes, sur l’estime de soi, sur les erreurs qui deviennent des outils pour apprendre… « Actuellement, certains profs ouverts le font ; mais ce n’est pas systématique. Ces notions commencent à peine à être dans les programmes. C’est un vrai changement culturel à impulser et il faut profiter de l’arrivée du numérique ! », déclare le chercheur.

Travailler avec la base

André Giordan regrette que les programmes scolaires actuels ne soient plus adaptés. « Les disciplines sont celles du XIX siècle ! Il faut introduire d’autres matières, comme la philosophie, la physiologie, le droit, les sciences… », conclut-il. Mais il reconnaît qu’il est difficile de changer les choses, entre les réformes et les contre-réformes qui viennent d’en haut, le corporatisme, la lourdeur du système, l’amnésie des bonnes choses, les erreurs des parents et le manque de formation des enseignants, en pédagogie, notamment.

L’ancien enseignant aujourd’hui chercheur n’est pas défaitiste : « Plein de choses se font au niveau local, des projets innovants dans les écoles, les collèges… Il faut travailler avec la base, avec les enseignants ». La clé serait là.

Conférence de la MPM avec André Giordan : « A l’ère du numérique, faut-il encore apprendre ? », au centre sportif régional de Mulhouse rue des Frères Lumière, le lundi 16 octobre à 19 h.

Source : http://c.dna.fr/edition-de-mulhouse-et-thann/2017/10/11/a-l-ere-du-numerique-faut-il-encore-apprendre

 

Au programme en octobre Pas moins de quatre rencontres

24/09/2017

Avec « Apprendre les uns des autres », la rencontre-débat du jeudi 5 octobre s’inscrit dans la droite ligne des échanges réciproques de savoirs. Avec Jean-Marie Labelle (professeur honoraire de Sciences de l’Éducation à l’Université de Strasbourg et ancien professeur associé à l’Université de Montréal), la réflexion engagée la semaine précédente lors de la fête des savoirs pédagogiques, se poursuivra, en remettant en cause la distinction solidement établie à l’École entre celui qui sait (et qui enseigne) et celui qui ne sait pas (et qui est là pour apprendre).

L’apprendre sera également au centre des ateliers pédagogiques d’octobre :

- Celui du mercredi 4 octobre , au titre volontairement interrogateur « Comment découvrir en dés-apprenant ? Comment savoir dés-apprendre pour découvrir ? », se présente comme une sensibilisation à la « pédagogie intégrative » de Danièle Bloch, pédiatre et auteure de la pédagogie intégrative. - Le mercredi 11 octobre , Nicole Poteaux, membre du CA de la MPM et professeur émérite en sciences de l’éducation à l’université de Strasbourg, propose une réflexion très ouverte à partir de l’interrogation : « Apprendre-enseigner : un couple infernal ? ».

- Enfin, dans le cadre de leur partenariat, le Crédit Mutuel Enseignant et la MPM accueillent André Giordan (instituteur, professeur de collège, de lycée et à l’université de Genève), le lundi 16 octobre , avec cette question : « A l’ère du numérique, faut-il encore apprendre ? » Une occasion de prolonger, avec l’auteur de « Apprendre ! », la réflexion sur ce qu’apprendre veut dire aujourd’hui, dans et hors de l’École.

Rens. et inscriptions sur le site : https://maisondelapedagogie.fr/

Source : http://c.dna.fr/edition-de-mulhouse-et-thann/2017/09/24/pas-moins-de-quatre-rencontres