Commencer à construire, ici et maintenant, l’école de demain

avec

Rencontre-débat n° 5, le 17 novembre 2016 à 18 h 30,

Campus de l'Illberg, École nationale supérieure de Chimie

Voir les photos de Jean-Marie Notter

Présentation 

L’école finlandaise est souvent considérée comme un modèle dont devraient s’inspirer de nombreux pays, notamment la France. A partir de la présentation que le film documentaire Demain fait de ce système éducatif, nous commencerons par en dégager les principales caractéristiques. Puis, nous inviterons les participants à dire ce qu’ils pensent pouvoir entreprendre, de leur place, pour commencer à construire des démarches pédagogiques pour l’École de demain. Enfin, nous essaierons de voir ensemble en quoi la Maison de la Pédagogie peut contribuer à cette construction. On l’aura compris : il ne s’agira pas d’ébaucher les contours d’une école prétendument "idéale", mais de recenser des "possibles" sur lesquels s’appuyer pour participer activement, au sein de l’École, à la réussite des jeunes et à la formation des citoyens de demain.

Quelques ouvrages pour préparer et/ou poursuivre la réflexion

  • E. Morin : Enseigner à vivre, Manifeste pour changer l'éducation, Actes Sud, 2014
  • F. Durpaire et F. Mabillon-Bonfils : La fin de l’école. L'ère du savoir-relation, PUF, 2014
  • F. Dubet et M. Duru-Bellat : 10 propositions pour changer l'École, Seuil, 2015
  • P. Meirieu : Manifeste, Le plaisir d’apprendre, Autrement, 2014

Projection du film la veille, le 16 novembre à 17 h

dans le cadre du festival « A l’affiche : films documentaires » organisé par le Service universitaire de l’action culturelle (SUAC) de l’UHA. Projection en présence de Brice Martin, maître de conférences en Géographie.
En partenariat avec NovaTris - Centre de compétences transfrontalières de l'UHA.

pause réflexive

Le compte rendu

de Jean-Marie Notter, membre du Comité d’animation de la MPM

Si vous préférez le lire (ou l'imprimer) en pdf...

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Soucieuse de varier les formules, la MPM nous propose cette fois-ci une soirée sans intervenant… Mais pas sans animateurs, ni sans animation… Ni sans ambition.

Etaient aux manettes ce soir-là : Jean-Pierre Bourreau et Michèle Sanchez, du Comité d’animation de la MPM, Annette Pasteau, de NovaTris et Holly Many, doctorant à l'UHA, en Sciences de l'éducation (parmi d’autres qualités, plus particulièrement chargé ce soir de la distribution de la parole).

Installées sur les bancs de l’amphi, plus d'une trentaine de personnes…

Après le mot de bienvenue par Annette et une rapide présentation de la MPM, Jean-Pierre introduit la projection d’un extrait (de 10 mn) du documentaire "Demain", diffusé la veille, à l’UHA Fonderie, dans son intégralité. Ce passage est consacré au système éducatif finlandais qui défraye la chronique du monde éducatif, depuis 2000, en raison de son bon classement dans les enquêtes PISA (Programme international pour le Suivi des Acquis des élèves).

Puis vient le moment de constituer de petits groupes de proximité afin de mettre en commun les réflexions des un(e)s et des autres dont il s’agira ensuite d’extraire une idée forte qui sera communiquée à tous/toutes les personnes présent(e)s.A l’issue de ce visionnement, nous sommes invités à une pause réflexive pour nous permettre d’identifier individuellement les "ingrédients", les caractéristiques du système finlandais.

Quand vient ce moment, et il arrive bien vite, les propositions fusent. Holly a fort à faire dans son rôle de modérateur et Michèle pour saisir et projeter à l’écran les propos des participants.

Brut de décoffrage, voici un petit inventaire de ce qui, selon les participants, caractérise le système éducatif finlandais :

travail en groupes

  • l'esprit collectif entre les différents acteurs
  • la qualité des rapports hiérarchiques
  • l'importance de la construction des relations

  •  

    la notion de communauté éducative soudée
  • "l'amour" des professeurs envers les élèves ; l’amour du métier. 

    Le terme "amour", emprunté au film, suscite des réactions diverses. « Impensable » dans notre école où surgirait rapidement le spectre de la pédophilie … Mot tabou, donc.
  • enseigner n’est pas évaluer

  •  

    apprendre à vivre ensemble et pour plus tard
  • la diversité des disciplines et des matières enseignées et égalité de valeur entre elles

  •  

    la transversalité des apprentissages
  • permettre le développement d’intelligences multiples

  •  

    les méthodes d’apprentissages diversifiées
  • les pédagogies alternatives et différenciées

  • l'utilité des apprentissages concrets et ancrage des connaissances dans le corps

  • la gratuité de l’école de 6 à 16 ans

  •  

    la construction du futur citoyen
  • l'élève, acteur de sa scolarité

  •  

    apprendre à être
  • les moyens humains (nombre d’enseignants et d’éducateurs) qui laissent rêveur.

  •  

    la formation des enseignants au cœur de la réalité des classes.
  • dix à vingt ans sont nécessaires pour faire évoluer un système.

À ce stade de la soirée, Nadia apporte un bémol à l’évocation dithyrambique du système éducatif finlandais en faisant part d’une lecture, dont peut également témoigner Annette. Il s’agit de l’ouvrage intitulé "La meilleure éducation au monde. Contre-enquête sur la Finlande" de Fred Dervin, un auteur franco-finlandais. Il en ressort que, depuis son classement si favorable en 2000, l’éducation finlandaise est devenue un produit d’exportation. Le mythe est entré dans une démarche marketing propice au tourisme pédagogique.

Le moment est donc bien choisi pour permettre à Jean-Pierre de nous inviter à "oublier la Finlande", pour chercher à répondre à la question : "Aujourd’hui, dans mon quotidien, que puis-je modifier pour construire l’École de demain ? ".

Les réponses sont à rédiger par groupe, sur une affiche qui, dans une bonne demi-heure, sera installée dans la salle. L’ensemble des travaux sera alors visible par toutes et tous et fera ensuite l’objet d’un échange collectif.

Ainsi dit, ainsi fait. Après 40 minutes de rédaction, fleurissent sur le tableau et les murs les affiches créées par les huit groupes. Nous disposons alors d’une bonne dizaine de minutes pour circuler dans la salle et prendre connaissance des travaux réalisés.

Impossible de prendre la mesure de la variété et de la richesse des propositions autrement qu’en ayant consulté les affiches, le fond et la forme étant intimement liés.

Quand il s’agit de reprendre place pour un temps de questions et d’échanges, le bouillonnement des idées est perceptible.

Prenons cependant le risque de dresser un catalogue des interventions où l’attente, l’impatience, la frustration et la perplexité alternent avec les propositions de tous ordres :

  • que pourrons-nous faire demain ? comment pouvons-nous avoir prise sur notre quotidien ? dans le cadre d’un projet ?

  • pour faire une proposition concrète : il est possible de créer un rituel mathématique dans la nature, pour ouvrir les yeux ;

  • le temps dont nous disposons n’est pas suffisant : nous avons déjà crevé beaucoup d’abcès …

  • il est écrit "Oser", en grand. Il faut donc laisser chacun expérimenter mais aussi mettre de la cohérence, de la souplesse, de la fluidité ; faire confiance à l’élève ;

  • il faut mettre de la réciprocité dans les interactions enfants/adultes ;

  • j’attendais plus de travail ; je suis déçu par la thématique face aux problèmes quotidiens. Devant les défis climatiques, économiques, les flux de populations, il faut envisager l’avenir dans une société différente de la nôtre ;

  • est-ce que je peux changer ? Me mettre en question ? Est-ce la bonne manière ? Quelles sont les petites choses qui … ?

  • oui, il faut savoir se mettre en question ;

  • l’École de demain est-elle possible dans le cadre de l’éducation nationale ?

  • avec 30 ou 40 élèves, comment faire de la pédagogie ?

  • pour moi, pas question que des élèves bavardent ou se déplacent en cours ;

  • la Maison de la Pédagogie fait-elle quelque chose pour … ?

Jean-Pierre rappelle alors que la Maison de la Pédagogie est là, parmi nous. Nous sommes réunis pour agir ensemble, permettre à l’élève de s’épanouir, au citoyen de se construire.

Et le brainstorming reprend de plus belle.

  • l’enfant apprend naturellement ; n’oublions pas que l’instruction est obligatoire, pas l’école ; peut-être n’avons-nous pas besoin d’école ?

  • apprendre à apprendre … d’accord pour reconnaître les capacités de l’enfant mais en Belgique existe le Plan pour la Réussite à l’intention des élèves qui ont des difficultés ; à la différence des études dirigées, les élèves peuvent venir à leur guise, dans un local qui peut accueillir une quinzaine d’enfants, pour faire leurs devoirs, en présence de profs de français, de maths, de sciences… ils peuvent demander de l’aide au prof qui est là pour leur donner des méthodes, des outils pour apprendre ;

  • il faut savoir alterner les temps informels et les temps formels ;

  • ll faut oser être soi ; c’est un problème de posture, et avoir également un cadre éthique ;

  • témoignage d’un coaching pour élèves en plus grande difficulté, en Belgique où l’école est communale, provinciale ou libre (privée) ;

  • il faut partager les expériences. Je suis surveillant dans un internat et j’observe que les étudiants ne se connaissent pas. Par mon comportement, j’essaie de leur transmettre des bribes d’intelligence relationnelle.

Manifestement, la demande, les attentes, les potentialités sont légion.

Mais le temps qui nous reste ne permet pas de dégager des actes pour la réflexion et pour l'action. Avant de nous quitter, il nous est donc demandé de compléter le point 2 de la fiche remise à l'arrivée : "En quoi pourrait consister la contribution de la MPM à la construction de l'École de demain ?" et de laisser la fiche à fins d'exploitation ultérieure.

À bientôt !

Jean-Marie Notter, membre du Comité d’animation de la MPM

Post scriptum

Le dépouillement des fiches laissées par les participants ne fournit pas de pistes précises en termes de contenu. En revanche, il s'en dégage un net désir de changement dans les pratiques de la part des participants. De façon récurrente, on attend de la MPM de permettre aux personnes qui souhaitent s'impliquer dans la construction de l'Ecole de demain de "se rencontrer", d'"échanger", de "découvrir" des pratiques différentes de celles qu'ils connaissent.

On évoque à plusieurs reprises la création de réseaux :

  • "soutenir les enseignants qui veulent évoluer, mettre en réseau les acteurs du changement",

  • "mettre en relation des personnes en recherche dans les mêmes directions"

  • "Il est en effet urgent que l'Ecole de demain apparaisse (enfin !). Je vois la contribution de la MPM à cette naissance comme une réunion des pédagogues qui œuvrent dans leur coin dans cet esprit. Ce serait déjà beaucoup".

Jean-Pierre Bourreau & Michèle Sanchez

Membres du Comité d'animation