La MPM avec

Éducation et sciences cognitives - Éléments clés des axes de la cognition et place du numérique -

Rencontre-débat

Lundi 7 décembre à 18 h 30

Apprendre est un acte complexe dont on n’a pas fini de comprendre les mécanismes. Apprendre peut se définir comme le développement des fonctions cognitives dont l’enjeu est au centre des objectifs du système scolaire.

Quels sont les points clés sur la connaissance de la cognition sur lesquels envisager une pédagogie adaptée ? Dans quel contexte le système scolaire les accueille-t-il ?

Jean-Luc Berthier apporte des éléments de réponse à ces questions en privilégiant certains axes de la cognition particulièrement concernés. L’objet du propos porte en particulier sur :

  • la plasticité cérébrale
  • le traitement des informations dans les systèmes de la mémoire
  • l’attention comme levier majeur des fonctions exécutives

J.-L. Berthier illustre la place adaptée du numérique, conformément aux études actuelles :

  • le test comme modalité de mémorisation
  • la différenciation par les parcours personnalisés
  • le développement de fonctions exécutives (attention, concentration, inhibition, mémoire de travail)
  • les mythes et biais à combattre

 

L'intervenant : Jean-Luc Berthier

Proviseur honoraire, ancien responsable de la formation des personnels de direction, École des cadres

IH2EF du Ministère de l’Éducation nationale.

Animateur-fondateur de l’organisation Apprendre et Former avec les sciences cognitives (2011)

Spécialiste en sciences cognitives de l’apprentissage

Éléments bibliographiques et sitographiques

Une trentaine d’ouvrage sur la pédagogie, la formation des personnels d’encadrement

Plus récemment

  • Les neurosciences cognitives dans la classe, Guide pour expérimenter et adapter ses pratiques pédagogiques,

Jean-Luc Berthier, Grégoire Borst, Frédéric Guilleray, Mickaël Desnos, Éditions ESF, 2018

  • Apprendre à mieux mémoriser, Jean-Luc Berthier, Frédéric Guilleray, Éditions Nathan, 2020
  • Le cerveau et les apprentissages (contribution) - ouvrage collectif dirigé par Olivier Houdé et Grégoire Borst, Éditions Nathan, 2018
  • Pédagogies alternatives et démarches innovantes, ouvrage collectif, contribution, Editions Nathan, 2020

Site : https://sciences-cognitives.fr/

Contact : Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.

Facebook : Apprendre et Former avec les sciences cognitives

Twitter : @BerthierBonfig2

Trace de Thomas CHOISY

Cette rencontre-débat s’est tenue en visio-conférence sur la plateforme Jitsi. Jean-Luc Berthier, le conférencier, a d’emblée annoncé que la rencontre serait interactive sur toute sa longueur, la plaçant ainsi sous le signe de la convivialité et du dynamisme. L’entièreté de la rencontre-débat n’a pas été exempte des problèmes techniques inhérents aux visio-conférences mais ceux-ci n’ont pas affecté en profondeur le bon déroulement de la soirée. L’auditoire distanciel a compté jusqu’à 41 personnes.

Qui est Jean-Luc Berthier ?

Ancien enseignant, proviseur, formateur de personnel de direction au sein de l’Education nationale, il a créé l’organisation Apprendre et former avec les sciences cognitives, dont le site internet est : sciences-cognitives.fr. Jean-Luc Berthier est auteur et co-auteur d’une trentaine d’ouvrages.

Jean-Luc Berthier prend la parole et présente lui-même son organisation, forte de 40 personnes du monde de l’éducation (dans ou hors de l’Éducation nationale), et reliée aussi aux 4 000 enseignants qui expérimentent leurs pistes pédagogiques dans leurs cogni-classes. L’organisation a pour but de sensibiliser à l’apport des sciences cognitives à l’éducation, former les enseignants aux sciences cognitives (40 000 l’ont été depuis une dizaine d’années), travailler en collaboration avec des laboratoires de la recherche neuro-scientifique (Sorbonne et École normale supérieure) pour bénéficier de leur apport, et expérimenter les sciences cognitives à travers le dispositif des cogni-classes (actuellement au nombre de 4 000).

La conférence d’aujourd’hui 

  • présentera le contexte des sciences cognitives (= SC) dans l’apprentissage
  • soulignera les points-clés de quelques mécanismes cognitifs dans l’apprentissage
  • et évoquera en filigrane (sans y consacrer un chapitre entier) la place du numérique dans ce domaine.

Le contexte des Sciences cognitives dans l’apprentissage

Les 3 questions fondamentales de tout système scolaire sont : qu’est-ce qu’apprendre ? qu’apprendre ? comment apprendre ? Les SC ont des suggestions à apporter sur ces questions.

Qu’est-ce qu’apprendre ?

Plusieurs définitions sont possibles; ainsi la complexification des réseaux de neurones (qui sont 90 milliards) créés pour l’essentiel dans les premiers mois de la vie. Comme il y en a trop, un système d’élagage naturel se met en place jusqu’à 20/25 ans. Ces neurones vont supporter savoirs, compétences, et fonctions exécutives : tout ce qui nous permet de penser et d’agir. Le premier élément fondamental est donc la plasticité cérébrale. Apprendre ne va pas augmenter notre stock de neurones, celui-ci restant stable à partir de l’âge adulte. Même si les premières années de la vie sont particulièrement propices à cela, on peut apprendre toute la vie.

Pour répondre à la question d’un auditeur, la théorie constructiviste de l’apprentissage - notamment représentée par Jean Piaget et sa théorie des stades de l’apprentissage - n’est donc plus valable du fait de la plasticité cérébrale. La part de l’inné est faible et la capacité de développement par expérience et apprentissage est considérable.

Pourquoi les enfants n’apprennent-ils pas tous de la même façon ? Les étapes de l’apprentissage sont les mêmes pour tous les humains mais nous avons tous un cerveau différent ; c’est donc plutôt une question de modalité d’enseignement (qui peuvent créer des divergences extrêmement fortes entre les enfants).

Quelques règles inspirées par ce que l’on sait du fonctionnement de l’apprentissage

1ère règle : chaque modalité pédagogique construit le cerveau (ce dont enseignants et familles ne se rendent pas forcément compte).

2e règle:  importance de l’inhibition, fonction exécutive majeure qui permet de mieux maîtriser sa pensée. Le monde scolaire est bien pauvre en activités qui permettent de développer l’inhibition. Mais la méditation (au sens large) en est une, remarquable ; les moments de calme mental sont très bénéfiques dans nos cogni-classes. On peut aussi mieux définir l’objet de son attention : préciser ce sur quoi l’on se concentre, et avec quelle intention.

3e règle : importance de la mise en situation de questionnement. Apprendre, c’est réduire les erreurs de prédiction. L’enseignement transmissif seul, par apport brut de connaissances, ne marche pas car il ne sollicite pas notre cerveau prédictif; il faut y adjoindre le questionnement, par des techniques de tests qui vont solidifier l’apprentissage. L’expérience montre que si on apprend moins de choses et si on consacre plus de temps aux tests, les élèves auront appris in fine plus de choses, paradoxalement. C’est là que l’apport du numérique se révèle fructueux, avec notamment les applications Socrative ou Plickers.

4e règle : le feedback, étape majeure de l’apprentissage, surtout le feedback négatif ou « erreur », si mal-aimée en France alors que c’est peut-être le grand levier de l’apprentissage.

5e règle : importance de la mémorisation, grand levier de la compréhension. Les techniques de mémorisation sont donc extrêmement importantes.

6e règle : phase de la compréhension, processus non binaire mais évolutif, qui s’effectue donc plutôt par degrés.

Conclusion: on ne peut pas comprendre sans savoir, d’où le grand intérêt des processus de mémorisation.

Jean-Luc Berthier corrige ensuite certaines fausses représentations de la mémorisation, grâce à l’apport des SC. Entre autres, il existe des centaines de systèmes de mémoire, mieux vaut se questionner que lire son cours pour l’apprendre, mieux vaut espacer l’apprentissage dans le temps, et le cerveau est naturellement multimode, ce qui rend caduc la théorie de profils d’apprentissage.

Qu’apprendre ? 

Jean-Luc Berthier souligne que le système français est très figé sur les programmes et oublie de former aux fonctions exécutives du cerveau et à la méta-cognition : ce seront les objectifs à venir du système éducatif.

 

Quelques questions d’auditeurs

  • le travail collaboratif → à développer, grâce à certains outils numériques comme Framapad.
  • l’impact négatif du port du masque sur l’apprentissage en classe → encore trop tôt pour le prouver avec sérieux.
  • la démarche de projet → doit être associée à des techniques de compréhension et de mémorisation.
  • le sommeil → très important car il est une phase de l’apprentissage.
  • le « réseau par défaut » → très important aussi ; quand on « rêvasse », le cerveau travaille autant que pendant la phase d’apprentissage volontaire.

Le temps imparti à la conférence étant écoulé, Jean-Luc Berthier clôt son propos en regrettant de n’avoir pu traiter entièrement tous les points annoncés, notamment des pistes pour aller plus loin ; sans doute reviendra-t-il pour une prochaine rencontre-débat ? Une suite est en cours de négociation avec la MPM.

Lien vers le support de présentation (diaporama) utilisé par J-L Berthier.

Trace réalisée par Thomas Choisy

(membre du Comité d’animation de la Maison de la Pédagogie de Mulhouse)

Décembre 2020