À la rencontre des grands pédagogues (suite) : Carl Rogers

Atelier

Lundi 21 janvier 2019 de 18 h à 20 h à la Maison des associations de Bourtzwiller (62 rue de Soultz, parking en face).

"Suffit-il d'écouter pour aider ?"

 

La pause du 19 décembre a été l'occasion de dégager certaines ressemblances et quelques différences entre les héritages de Célestin Freinet, de Rudolf Steiner, de Maria Montessori et la pédagogie institutionnelle de Fernand Oury (voir "traces" de ces séances).

Les participants ont également manifesté le souhait de poursuivre ces rencontres mensuelles. La saison 2 s'ouvre le lundi 21 janvier par une "rencontre" avec Carl ROGERS (1902-1987), auquel est attaché le concept de "non-directivité". Comme dans les rencontres précédentes, nous partirons du petit film documentaire réalisé par Philippe Meirieu, avec cette interrogation : "Suffit-il d'écouter pour aider ?"
Les échanges entre participants permettront de dégager les grandes lignes de la pensée et des pratiques du psychologue-pédagogue américain, avant d'en évoquer la pertinence et les résonances avec les pratiques pédagogiques et éducatives d'aujourd'hui.

Animation

Rencontre animée par Jean-Pierre Bourreau (membre du Comité d'Animation de la MPM)

Trace

À la rencontre des grands pédagogues : Carl ROGERS

le 21 janvier de 18 h 30 à 20 h 30

Lieu : Maison des associations de Mulhouse, quartier de Bourtzwiller

Nombre de personnes présentes : dix.

Présentation : Jean-Pierre Bourreau, membre de la Maison de la pédagogie, a organisé un temps d'échanges et de débats sur un thème lié à la pédagogie et l'éducation.

Un petit documentaire d'une quinzaine de minutes de Philippe Meirieu a été diffusé. Ce film a offert un certain nombre de réflexions sur la méthode d'éducation et de médiation prônée par Carl Rogers (1902, 1987) via l'écoute. Avec cette question : "Suffit-il d'écouter pour aider ?"

Contexte : les courants de la psychologie et de la psychothérapie au début du XXe siècle, qui permettent de positionnement de Rogers

Dans la première moitié du XXe siècle, on distingue trois courants en psychologie : la psychanalyse, la psychologie comportementale et la psychologie du développement de la personne. Les théories de Carl Rogers s'inscrivent dans la branche de la psychologie et de la psychothérapie liée au développement de l'individu. Les théories de Rogers ont été mises en œuvre aussi bien dans le champ de l'éducation que dans la lutte contre la violence.

Il a été demandé aux membres du groupe de noter individuellement sur papier une idée sur ce chacun a retenu du film, puis d'en faire part au groupe.

L'idée de bienveillance et d'écoute active est ressortie du groupe comme étant la notion maîtresse du document.

Brève biographie de Carl Rogers présentée dans le documentaire et ce qui a été relevé lors des échanges oraux.

Carl Rogers est un psychothérapeute américain ayant vécu une enfance paisible dans une ferme. Très attiré par la méditation, Il s'est passionné pour la théologie et l'étude des religions dans son adolescence pour enfin s'orienter vers la psychologie. Il a axé ses recherches pour sa thèse de 1931 sur les relations d'aide en mettant en avant une thérapie orientée sur le développement des individus. Il est devenu enseignant en 1940 à l'université de l'Ohio. Petit à petit, il a adopté, par l'écoute, une pédagogie non directive dans le sens où la fonction de l'enseignant n'est plus d'ordonner l'apprentissage de connaissances, mais d'accompagner l'apprentissage de ceux qui veulent apprendre.

Selon Rogers et selon le consensus qui s'est dégagé du groupe, pour aider positivement une personne, il faut de prime abord l'écouter sans jugement. Il faut ensuite essayer de la comprendre en faisant preuve d'empathie, en essayant de déchiffrer les émotions et les pensées qui émanent de la rencontre avec elle. Enfin, il est nécessaire de faire preuve de congruence, c'est à dire de veiller à être soi-même, authentique, pour que l'autre puisse à son tour atteindre une forme de singularité.

Des échanges se sont aussi centrés sur la nécessaire reformulation constante pour permettre à la personne aidante de mieux distinguer les difficultés de l'individu aidé (selon la méthodologie de Rogers). Cela permet d'éviter les contre-sens et d'identifier les problèmes, du plus évident au moins évident. Au final, la personne aidée peut, par ce cheminement, prendre conscience de ses blocages, phase essentielle pour pouvoir s'en libérer, s'améliorer et davantage apprendre sainement. Il apparaît important au groupe de permettre à l'élève de s’entraîner à reformuler constamment, avec ses propres mots, les situations pour pouvoir bien apprendre, en laissant de côté tout jugement.

Des échanges ont en outre porté sur la définition et l'étymologie du mot « empathie », notion essentielle pour Rogers dans une posture d'écoute positive susceptible d'aider la personne. L'empathie a été définie par le groupe comme l'état qui consiste non à se mettre à la place de l'autre, mais à percevoir, ressentir et comprendre les émotions d'autrui. Des remarques ont été formulées sur l'étymologie de l'empathie, du grec « pathos » qui signifie la passion, mais aussi la souffrance, qui ferait de l'empathie, par extension, cette capacité à ressentir, en partie, la souffrance de l'autre.

Au final, l'écoute est-elle suffisante pour aider autrui ?

L'écoute active permet d'aider autrui en ne condamnant pas les individus et les élèves qui se trompent, mais en étant un moyen pour ces derniers d'apprendre et de s'améliorer via la compréhension de leurs erreurs. Cette posture énoncée par Rogers a été validée par le groupe. Inversement, dans le cas de l'écoute passive sans implication, il est plus difficile, voire impossible de pouvoir aider l'autre. Il faut laisser s'exprimer la personne, ne pas avoir de jugements, ne pas l'interrompre, l'inciter à reformuler, ne pas lui sonner de conseils et chercher à pousser celle-ci à se remettre en question.

Un document a été distribué en fin de séance à chacun des membres du groupe.

Ce document était un extrait de l'ouvrage coordonné par Jean Houssaye : « Quinze pédagogues » aux éditions Armand Colin et daté de 1997. Les participants ont lu quelques minutes et quelques-uns ont ensuite fait part au groupe d'un passage qui les a interpellés. Ce document est apparu comme un prolongement des théories et des pratiques de Carl Rogers.

Merci à Amory Glantzmann d'avoir assuré la rédaction de cette "trace" de la rencontre avec Carl Rogers (qui était sa première rencontre avec un grand pédagogue et avec la Maison de la pédagogie).

Jean-Pierre Bourreau – Février 2019